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Bono : aider l'Afrique tout en s'adaptant à la crise

Bono : aider l'Afrique tout en s'adaptant à la crise



En complément à son apparition hier soir au Grand Journal de Canal +, Bono a donné une interview à l'AFP que l'on retrouve ce matin sur de nombreux sites dont ceux de Libération et du Point.

Le chanteur de U2 poursuit sa campagne de sensibilisation à la famine dans la corne de l'Afrique tout en adaptant son discours au contexte économique mondial. Renonçant à demander aux dirigeants mondiaux de tenir leurs promesses, il prend en compte les difficultés économiques réelles du monde occidental et cherche maintenant à démontrer aux chefs d'Etas tout l'intérêt qu'il y aurait se préoccuper de l'Afrique.

Voici le texte de son interview :

- Question : Qu'attendez-vous du sommet du G20, au moment où les pays riches traversent une grave crise économique qui les oblige à se serrer la ceinture?
- Réponse: Je ne veux pas faire l'autruche militante qui enfouit sa tête dans le sable, comme un disque rayé qui répète sans cesse la même chose: "vous n'avez pas tenu vos promesses, vous n'avez pas tenu vos promesses"! Bien sûr, nous demandons aux pays riches de tenir leurs promesses, mais il faut avoir un peu d'empathie pour ce que les gens traversent. Ce sont des moments très difficiles, la crise dans la zone euro peut vraiment affecter la qualité de vie des gens.

- Question: L'opinion publique et les Etats risquent donc de couper dans les budgets de l'aide au développement...
- Réponse: C'est un fait, avec la crise les pays riches peuvent être moins généreux. Mais les coupes budgétaires ne peuvent pas coûter des vies humaines. Les Français savent qu'ils sont très généreux. Il faut leur expliquer ce qui est réalisé avec leur argent: la France est leader dans la lutte contre le paludisme, contre le VIH/sida, et maintenant contre la corruption qui tue plus d'enfants que le paludisme. C'est un usage bon et efficace de leurs impôts.

- Question: Pourquoi faut-il continuer à aider l'Afrique?
- Réponse: Ce n'est pas seulement un impératif moral, en fait c'est aussi un impératif stratégique pour l'avenir. Ce sont des emplois! L'Afrique est potentiellement notre principal partenaire commercial, qui peut tirer l'industrie française de manière inimaginable! La France est en position unique pour tisser une relation avec l'Afrique, qui sera le principal moteur de la croissance à partir des années 2050.
Il faut mobiliser les ressources locales. L'initiative pour la transparence dans les industries extractives, par exemple: ça ne coûte rien. L'Afrique est un continent très très très riche, et il faut réussir à sortir cette richesse de sous les pieds des gens pour la mettre entre leurs mains.

- Question: Avec la crise, les Etats européens semblent enfin décidés à créer une taxe sur les transactions financières, réclamée par les ONG, mais ne risquent-ils pas d'en affecter le produit à leur propre désendettement plutôt qu'au développement des pays pauvres?
- Réponse: Nous devons accepter le fait qu'une part de cette taxe serve à aider les pays riches à sortir de la crise d'une manière ou d'une autre. Mais on peut imaginer que la part allant à la lutte contre les inégalités dans le monde augmente au fur et à mesure que la crise est derrière nous. Je pense que la taxe va enfin voir le jour, même si ce risque qu'elle soit détournée est réel. Ce que je ne voudrais pas, c'est une situation où un blocage sur la taxe bloque tout le reste.

- Question: Comment avez-vous trouvé la réaction de la communauté internationale face à la famine dans la Corne de l'Afrique?
- Réponse: Les bailleurs de fonds ont mis du temps à réagir. Ils étaient tellement concentrés sur leur idée de "nouvelle Afrique" qu'au début de la famine, ils étaient dans le déni. Ils ne voulaient pas croire qu'on en était revenus à ce qu'a connu l'Ethiopie dans les années 1980. Et intervenir c'est compliqué, il y a une guerre civile (en Somalie, NDLR)... Mais ça ne veut pas dire qu'il ne faut rien faire: 30.000 enfants sont morts ces trois derniers mois.
Il faut aussi insister sur le fait que ce n'est pas normal qu'il y ait une famine. Ce n'est pas une fatalité. On devrait faire en sorte qu'une sécheresse ne se transforme pas systématiquement en famine.

Question: N'y a-t-il pas un risque à aider des régimes qui sont souvent corrompus?
Réponse: Si des régimes corrompus qui oppriment leur population reçoivent beaucoup d'argent de la part d'un donateur, il faut que cela se sache. Il faut que tout soit transparent.


Bono : aider l'Afrique est un impératif stratégique mais il faut s'adapter à la crise



Par U2achtung / Lien permanent vers la news